Mots de l'auteur : tous dans le même bateau...

Cette rubrique est un peu comme un bloc notes...
Y sont inscrites des remarques temporaires...




Au sommaire pour l'instant :

- Grandir ensemble
- Tous dans le même bateau...
- La couverture
- Des taupes et des étoiles...
- Jean-François Mercurio : au-delà du bilinguisme





Je sais pas trop comment l'écrire...
Je ne suis même pas sûr de l'utilité d'écrire encore...

Mais j'ai une intuition dans le ventre qui m'y pousse...
ou le simple besoin de m'exprimer... voire de partager... dans l'idéal...

Pourtant je n'ai pas envie de développer le sujet...
Ni non plus d'argumenter... je n'ai pas nécessairement envie qu'on me croit...

Cette intime conviction, cette intuition se porte sur l'éducation des enfants, qu'ils soient sourds ou entendants...
Elle me dit que tout est pareil... les enfants entendants ne sont pas mieux logés... et il se pourrait même qu'un jour les enfants sourds aient une meilleure éducation que les entendants...

Je sais aujourd'hui que ce que dénonce le docteur Benoît Drion dans "meurtre en musique" ( [bdrion.over-blog.net] ) est d'application également avec les enfants entendants...

Les enfants « normaux » sont pris dans l’étau stérilisant de la normalisation et de l’uniformisation, dans les cadences artificielles et effrénées d’un monde devenu essentiellement à idéologies économistes et utilitaristes… Les enfants sont des produits.
L’enfant est utilisé, mis en paquet cadeau, mis en scène, on lui met des mots dans la bouche, on lui rajoute des paillettes et des éclairages, des grimages ou des frusques, on vous l’habit de mensonge et de fausseté, on lui met des gestes à reproduire, des actions à faire, on l’opprime au passage pour qu’il soit un bon répétiteur, pour qu’il adopte « la belle image » derrière laquelle on ne le verra plus… plus du tout…

Ces handicaps, ceux des gens « normaux », sont non pas internalisant, mais externalisant…

Internalisant ; puisque les personnes dites "handicapées" cherchent d’une manière ou d’une autre à affirmer et à retrouver leur autonomie qu’ils auraient confiée ou qu’on leur aurait dérobée à force d’assistance et de déni…
Externalisant ; puisque les personnes "normales" confient ce qui leur revient, puisqu’ils délèguent à « l’autre » la tâche qui leur est propre, puisqu’ils imposent ou apposent à « l’autre » ce qu’ils n’assument pas eux-mêmes, puisqu’ils surajoutent de ce qu’ils sont pour en faire peser le poids aux « autres »…

« Et si le handicap c’était la normalité » disait la banderole…


Quand j’écris que je me sens comme eux… ce n’est pas allégorique ou métaphorique…
Je suis vraiment handicapé de ce monde qui semble se détourner davantage chaque jour de ce qui peut encore le ramener à la vie…
Comme la voix frêle d’un enfant qui n’arrive pas à se frayer un chemin parmi les vociférations des « grandes personnes », les hurlements de la radio ou de la télévision, des assourdissants avions qui passent tout près… et de toutes les stridentes sonneries de téléphone portable…
Un infans qui fini par se taire dans tout ce vacarme… bouche cousue... et, se détournant du « spectacle » sérieux des adultes, se met à entendre le chant des oiseaux bleus… de l’autre côté de la planète... malgré tout le bruit et la vitesse des accumulations.
Un handicap ou une situation de handicap… ou une simple différence d’ordre plus encore ontologique que métabolique, plus encore au niveau de l’être qu’au niveau physique…

ma lenteur ou mes hésitations (en plus de mes silences) sont prises pour je ne sais quoi, et on me vole ce que je ne possède pas… le temps qui m’est propre… mon rythme qui ne leur ressemble pas…
Alors on vole ce rythme… parce que je ne cherche pas à le posséder… parce que je le respecte tel qu’il se présente, sans le juger, et que je ne cherche pas à me nier en entrant dans les créneaux-horaire cubiques, ou en entrant dans les rôles appris de la bienséance… où l’on n’a de cesse de se perdre…
Alors ils usurpent mon rythme propre, comme s'ils m'arrachaient le pain de ma bouche, ou comme s'ils me piétinaient pour pouvoir monter dans le bus...
Mon corps n'est pas atteint, mon mental non plus, pourtant je me sens profondément handicapé de ce monde...
Comme si on ne vous laissait pas même répondre à la question qu’on vient de vous poser, vous coupant cette parole que vous n’avez pas eu le temps de prendre, vous privant de l’action et de la compréhension… on passe déjà à autre chose… Vous restez coi… dans le vide…

Mais on vous assassine quand on ne vous laisse pas être vous-mêmes selon votre propre rythme… on vous abandonne dans l’incommunicable et le non-partage… Et quand on vous vole votre rythme, on vous exclue ou on s’exclue, on n’entre jamais en relation, on reste étranger l’un pour l’autre, et sans doute alors à soi-même… on s’aliène…
C’est ce que je vis aussi, c’est ce que j’ai toujours vécu… sauf que le ciel m’a donné la capacité de mettre des mots dessus et de témoigner pour ceux qui n’ont pas l’opportunité de dire… dire l’ampleur de ce qu’ils voient et de ce qu’ils vivent, ce qu’ils ressentent au plus profond… le cœur au bord du vide, l’ange qui nous guide entre les orages et les naufrages… juste pour avoir le courage de dire… ou de hurler…

Qu'on soit handicapé (physiquement ou mentalement) ou dévalorisé (marginaux, sdf, etc) qu'on soit noir de peau, qu'on soit homosexuel, ou obèse, ou qu'on soit un de ceux qui prennent (les handicapés de la normalité)... tout ça revient au même... il s'agit de s'accepter tel qu'on est... il s'agit d'accepter l'autre dans sa différence...

« Et si le handicap c’était la normalité » disait la banderole chez Nathalie…
Les gens pleuraient tellement c’était beau…
tellement l’amour était présent et manifeste…
c’était là sous nos yeux…
en train de s’exprimer librement…
J’ai connu la lumière et l’amour, là où les gens ne croient ni plus au miracle ni à l’amour… quand j’ai vu Nathalie S. danser avec cette jeune femme en chaise roulante…
Cette lumière-là c’est de l’amour qu’elle vient, c’est du ciel qu’elle vient… et elle va dans les rires pour les porter d’un cœur à un autre, déplier ce qui était nouer, délier ce qui était crisper par l’angoisse… raviver la vie de ce qui était éteint, nettoyer les larmes de l’histoire vécue…

Toutes ses rencontres qui, au fil des jours, finissent par n’être plus encombrées par les vieilles scories de l’ancien monde… et chaque pas franchis est une marche incertaine vers un lendemain où n’existe plus les naufrages et les abîmes du doute et de la peur… la Lumière alors papillonne d’un cœur à un autre pour partager une Table d’Hôte dont les mets favoris sont les éclats de rires colorés… ceux des enfants… Ces enfants, peu importe qu’ils soient dans des corps d’âge mûr ou dans des corps enfantins, ou dans de vieux corps usés, ou encore dans des corps « handicapés »… simplement différents


Les enfants "handicapés" ou "normaux"...sont dans le même bateau que nous...

Que faire...

Jean-François Mercurio, toujours lui, donnait déjà des pistes :

Nous devons nous inspirer des enfants.
Ils sont notre force pour continuer à combattre et avancer.
Nous adultes, sommes confrontés à des problèmes politiques,
des questions sans réponses.
C’est en nous tournant vers les enfants qu’on s’aperçoit qu’ils sont justes, parce qu’ils sont neufs.
Les problèmes que nous avons rencontrés depuis l’enfance, nous devons nous en dégager en nous tournant vers les enfants.
Laissons nos problèmes avec les entendants et cherchons des solutions au niveau de l’enfance.
C’est en débattant des questions éducatives que nous trouverons des solutions politiques.




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